METAL ADVENTURES

LE JEU DE RÔLE DE PIRATES DE L’ESPACE

«LE JEU DE RÔLE N’EST PAS MORT!» C’EST EN TOUT CAS CE QUE CLAME HAUT ET FORT L’AUTEUR DE METAL ADVENTURES, ARNAUD CUIDET. ALORS QU’EN EST-IL DE SON OEUVRE APRÈS PRESQUE 6 ANS? CHANT DU CYGNE OU CRI DU PHÉNIX?

TITAM - JDR Mag 29 - Metal AdventuresMetal Adventures
Type: Jeu de rôle
Auteurs: Arnaud Cuidet
Illustrateurs: Dimitri Bielak, David Cochard, Rémi Le Capon, Jérôme Oyhenart, Geoffrey Stepourenko (couverture) et Jean-Mathias Xavier.
Éditeur: Matagot
Genre: Space opera

TRAITS
Background:
-familier voire caricatural en surface
-riche et nuancé en profondeur

Gameplay:
-innovant et dynamique
-exigeant une bonne maîtrise des règles

Produit:
-rétro pour les amateurs de space opera
-qui constitue un bel hommage au genre

Rétro ou ringard?
On peut dire en tout cas que la gamme Metal Adventures se porte bien: avec dix livres parus en 5 ans et de jolies ventes, ce jeu édité par Le Matagot est un beau succès hexagonal.

Il est vrai que sur les rayons des boutiques, ce petit nouveau intégralement relié et en couleur n’a pas à rougir face aux ténors internationaux.

La mise en page est quant à elle claire et soignée. Et heureusement, car le texte est très dense. Metal Adventures n’échappe d’ailleurs pas au syndrome AD & D: chaque supplément introduisant de nouveaux points de règle, l’absence d’index se fait douloureusement sentir lorsqu’on recherche la description d’une action.

La bonne idée de l’auteur est d’avoir inclus dans chaque supplément des mini-aventures prêtes à jouer ainsi qu’un épisode d’une campagne au long cours. Cette dernière offre des enjeux à l’échelle galactique et met en scène des bouleversements dignes de 24 heures chrono.

Il est d’ailleurs amusant de constater que là où cette construction de gamme et d’intrigue inscrit Metal Adventures dans la modernité, les illustrations sont quant à elles résolument ancrées dans l’imagerie des années 80. Les couvertures évoquent tour à tour les affiches de La Guerre des étoiles ou d’Albator, tandis que les femmes anatomiquement improbables et les hommes au sourire ultra-bright font irrésistiblement penser à Cobra. Un voyage dans le passé qui peut titiller la nostalgie ou agacer, selon qu’on est sensible ou pas au charme un peu ringard du space opera d’antan.

TITAM - JDR Mag 29 - Metal AdventuresDu neuf avec du vieux
Ces influences, et beaucoup d’autres, sont également perceptibles dans l’univers du jeu, qui donne au premier abord l’impression d’un melting pot de tout ce que la SF a produit depuis 50 ans: dans une galaxie déchirée par la guerre entre deux empire
hégémoniques, tiraillée entre les manigances de la guilde des marchands et les manoeuvres politiques de la ligue démocratique, les joueurs incarnent des pirates de l’espace épris de liberté et de rhum qui vont de planète en planète pour déterrer de mystérieux trésors et secourir d’exotiques princesses. Weird Tales nos 1 à 867, n’est-ce pas?

Mais peut-être est-ce parce que Metal Adventures est l’oeuvre d’une seule plume, toujours est-il que ce mélange qu’on pourrait croire indigeste révèle très vite une harmonie et une fi nesse insoupçonnées. Derrière ce cadre familier pour quiconque a lu ou vu de la SF au moins une fois dans sa vie, les lignes se brouillent et l’exposé simpliste laisse place aux nuances de gris. Le souci apporté à chaque détail et l’imbrication de tous les éléments créent une profondeur qui donne vie à un univers mature et brutal où les dilemmes moraux abondent. Faut-il accepter d’accomplir les sales besognes de ce marchand d’esclaves pour obtenir le code d’entrée de la base, ou bien est-il préférable de séduire et manipuler un officier humaniste, au risque de le faire exécuter pour trahison ou de l’amener à renier ses idéaux?

Bien sûr, il est tout à fait possible de s’en tenir aux descriptions généralistes des différentes factions. Celles-ci sont suffisamment claires et détaillées pour planter un décor qui parlera aux joueurs. Mais il serait dommage de se priver des intrigues et des personnages complexes qui y insufflent des passions humaines, dans toute leur complexité et leur ambivalence.

Dans la peau des héros
Mais là où Metal Adventures rompt avec le passé, c’est sur le plan des règles. Rarement un gameplay aura autant été en adéquation avec l’univers et l’ambiance d’un jeu. Tout est pensé pour pousser les PJ à l’héroïsme et leur faire vivre des aventures bigger than life. Depuis la classification des PNJ (figurants ou personnages) jusqu’aux bonus de fin d’aventure pour les actes de bravoure insensés, les règles plongent les joueurs dans une superproduction hollywoodienne gonflée aux hormones. Incarnant un équipage picaresque qui triomphe de l’adversité grâce à une audace inconcevable pour le commun des mortels, les PJ sautent de vaisseau en vaisseau, défient en duel des mutants bodybuildés, font assaut de politesse avec les puissances de la galaxie, échappent in extremis aux pièges de temples alien ou brisent un blocus planétaire au milieu d’une bataille spatiale. Deux mécanismes en particuliers entretiennent le rythme et la tension dramatique: le metal factor et le panache.

Le premier désigne une réserve de 50 dés (le jeu repose sur des jets de D6: plus la compétence et la caractéristique sont élevées, plus on jette de dés; chaque dé faisant 4 ou plus compte comme un succès et ces succès sont additionnés). Chaque dé pioché dans cette réserve est ajouté aux dés normalement jetés pour résoudre l’action, augmentant considérablement les chances de succès des exploits les plus démesurés. Mais en contrepartie, ces dés de metal factor utilisés par les joueurs viennent alimenter la réserve du MJ, qui peut à son tour les dépenser pour permettre aux PNJ de se dépasser ou déclencher des périls. Le MJ les rend ensuite aux joueurs.

Par cet ingénieux système de vases communicants, l’opposition se met naturellement au niveau de l’équipage et les personnages sont toujours sur le fil du rasoir. Le second mécanisme, le panache, est le filet de sécurité qui permet aux PJ les plus timorés de prendre des risques insensés pour accomplir des actions flamboyantes: chaque personnage dispose d’un petit nombre de points de panache, qu’il peut dépenser pour au choix survivre miraculeusement, produire une coïncidence rocambolesque, ou déclencher une aptitude spéciale accessible uniquement aux PJ. Ainsi, la punition en cas d’échec d’une tentative héroïque n’est pas la mort du personnage, mais simplement la perte d’un de ces précieux points de panache, à la manière des points de Destin de Warhammer.

Tout n’est pas parfait cependant. Pour commencer, les règles sont rendues complexes par les nombreuses interactions entre compétences, aptitudes, modifi cateurs, spécialités et pouvoirs de mutants. Cela rend les oppositions très tactiques, et si certains joueurs s’en réjouiront, tous n’apprécieront pas de devoir intégrer des dizaines de facteurs pour faire agir leur personnage. Bien sûr, c’est aussi cette richesse des possibilités qui fait que deux combats ne se ressembleront pas. Mais cela demande une forte implication des joueurs pour connaître les règles liées à leur personnage et nécessite que le MJ se montre ferme sur la durée du tour, au risque sinon de voir l’action tourner au puzzle tactique à la D&D 4e.

Les voyages spatiaux peuvent également rebuter par leur aspect simulationniste: Metal Adventures prévoyant la gestion des postes et des quarts de l’équipage, cela tourne vite au casse-tête pour savoir qui est éveillé et à quel poste lorsque le vaisseau tombe proue à tentacule avec un kraken de l’espace.

Heureusement, les règles permettent dans la plupart des circonstances de faire l’ellipse du voyage, à la manière de Star Wars. Ces défauts restent cependant mineurs dans un système de jeu qui surprend souvent par son équilibre et sa robustesse.

Un air de déjà-vu qui réserve des surprises
Si Metal Adventures donne au premier abord l’impression de recycler tous les lieux communs de la SF, il en émerge rapidement une profondeur rafraîchissante grâce à un gameplay innovant et aux innombrables détails qui donnent vie et cohérence à cette galaxie familière mais pourtant originale.

Yoann Passuello.

 

TITAM - JDR Mag 29 - Metal AdventuresMETAL ADVENTURES… BOARDGAME!
Ce numéro salue la nouvelle en proposant certains équipements mentionnés dans cette adaptation en jeu (cf. p. 49). Dans ce jeu, chaque joueur dirige un équipage de pirates de l’espace qui part à l’aventure dans la Galaxie pour aff ronter les vaisseaux des nations stellaires et surtout… récupérer des trésors! Ce jeu de plateau a été conçu par Lionel Borg qui a apporté un soin particulier à retranscrire le background du jeu de rôle et à en traduire les mécaniques, notamment le Metal Faktor.
Sortie… Imminente.

 

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