D&D5: PLAYER’S HANDBOOK

LE RETOUR DU TITAN DU JEU DE RÔLE

LE 9 JANVIER 2012, UN PETIT GROUPE DE BLOGUEURS ET DE JOURNALISTES TRIES SUR LE VOLET ETAIT CONVIE DANS LE PLUS GRAND SECRET DANS LES LOCAUX DE WIZARDS OF THE COAST POUR TESTER LA TOUTE PREMIERE VERSION DE CE QUI ALLAIT DEVENIR LA CINQUIEME EDITION DE DONJONS & DRAGONS. APRES PLUS DE DEUX ANS D’ATTENTE DURANT LESQUELLES UN GIGANTESQUE PLAYTEST PUBLIC RASSEMBLANT DES DIZAINES DE MILLIERS DE JOUEURS A ETE MENE? LA NOUVELLE VERSION DU GRAND PAPA DES JEUX DE RÔLE EST LA!

 

TITAM - JDR MagD&D Player’s handbook
Auteurs: Collectif
Illustrateurs: Tyler Jacobson
Éditeur: Wizards of the Coast
Genre:  Med-fan

TRAITS
Background:
-léger (c’est un Player’s Handbook)
-qui fait la synthèse des éditions précédentes

Gameplay:
-riche
-fonctionnel
-épuré

Produit:
-riche
-clair
-pratique
-globalement bien illustré

 

Après le semi-échec de la quatrième édition et la terrible guerre des éditions qui donna naissance au mouvement OSR et permit à Pathfinder de ravir la première place du podium à l’ancêtre, l’inquiétude était grande que D&D5 ne soit pas à la hauteur et ne réussisse pas à concrétiser son grand projet de réunifier sa communauté autour d’une version du jeu qui puisse répondre aux attentes des fans.

Le moins qu’on puisse dire c’est que Wizards of the Coast a fait un travail remarquable et que le résultat est largement à la hauteur de ce qu’on pouvait espérer. Il y a de quoi rendre le sourire à tout le monde avec des dizaines d’options pour les fans de la troisième édition, une bonne grosse dose de fluff bien inspirante pour les nostalgiques de la deuxième et une mécanique de jeu qui tourne comme une horloge suisse et qui devrait satisfaire autant les amateurs de modularité de la quatrième édition que les défenseurs de la simplicité de la première.

Pour ne rien gâcher, ce manuel des joueurs de 320 pages est aussi un objet magnifique, clair, pratique, agréable à lire et regorgeant de somptueuses illustrations qui donnent envie de partir immédiatement à l’aventure (et de quelques autres qui piquent un peu les yeux quand même, du moins selon mes goûts personnel). On remarquera d’ailleurs l’effort qui a été fait pour que ces illustrations refl ètent un peu plus fidèlement la diversité des joueurs de D&D en présentant des aventuriers qui, pour une fois, ne sont pas tous des supermans maniant des épées trois fois plus grandes qu’eux ni des bimbos en bikini de maille mais, au contraire, ont l’air de vrais gens de toutes les races, de tous les âges et surtout de toutes les morphologies. Le tout a une vraie personnalité propre qui, tout en se démarquant franchement de ses prédécesseurs, clame haut et fort qu’il est Donjons & Dragons et fier de l’être.

Que trouve-t-on dans ce manuel des joueurs?
Après quelques pages d’introduction reprenant les classiques explication de ce qu’est un jeu de rôle, illustrées d’un exemple assez rapide, le coeur de l’ouvrage est divisé en trois parties couvrant respectivement la création de personnage, les règles du jeu et la magie. La première partie est la plus importante puisqu’elle couvre près de la moitié du manuel. Le lecteur y est guidé pas à pas dans la création de son personnage qui se compose du choix de sa race, de sa classe, de son background puis des touches finales que sont l’équipement et des options de customisation avancées. Le panel de races et classes retenu pour cette nouvelle édition devrait contenter tous les anciens fans de D&D puisqu’on y retrouve, à une ou deux exceptions près, toutes les possibilités offertes dans les livres de base des quatre précédentes éditions. De plus, chaque race et chaque classe est elle-même subdivisée en sous-options dont la combinaison permet à elle seule de créer des centaines de personnages différents.

TITAM - JDR MagLa liste des classes est pléthorique puisqu’elle n’inclut pas moins de douze classes assorties d’une quarantaine de sous-classes différentes, allant de la version la plus basique du guerrier au sorcier tout droit tiré de la quatrième édition, en passant par le druide du cercle de la lune spécialisé dans les changements de forme ou encore les trois sous-classes du moine et leur myriades d’options pour canaliser son ki. La sélection balaie à peu près tous les grands archétypes de la fantasy et offre pour chacun d’eux des niveaux de complexité technique variés qui devraient permettre à chacun d’y trouver son compte.

Ensuite vient le moment de choisir son background parmi une dizaine d’options. Il s’agit surtout d’indications de roleplay, de tables aléatoires donnant une foule d’idées aux joueurs débutants pour donner du caractère à leur personnage et d’avantages liés au métier.

Puis vient un chapitre sur l’équipement qui couvre bien sûr les armes et les armures mais aussi tout le matériel nécessaire pour partir à l’aventure. On y trouve des règles simples pour gérer son niveau de vie ainsi qu’une très sympathique table de génération aléatoire de bibelots dans laquelle se trouve listé tout un tas de petits objets qui sont autant d’accroches de scénarios tels qu’un journal écrit dans une langue inconnue, un fourreau qui ne correspond à aucune lame ou bien encore un simple oeil de verre.

La première partie du livre se conclut par les options de customisation que sont le multiclassage et les dons. La version cinquième édition du multi-classage
reprend le principe de la troisième édition qui permet de piocher ses niveaux à travers toutes les classes en y ajoutant cependant un système de lissage des combinaisons d’aptitudes qui devrait éviter les dérapages que les multi-classeurs fous ont pu connaitre dans le passé. Les dons sont en revanche beaucoup plus costauds mais tout autant porteurs de roleplay: au-delà du classique «spécialiste des armes à deux mains» on trouve aussi le très coloré «bagarreur de taverne» et «explorateur de donjons».

La deuxième partie du livre présente les règles du jeu et on peut dire que celles-ci ont bénéficié d’un superbe effort de simplification et d’harmonisation puisqu’elles permettent de couvrir à peu près toutes les situations en à peine une trentaine de pages. Le coeur du système s’appuie sur les caractéristiques et leurs bonus. On retrouve bien évidemment les six caractéristiques classiques de D&D et l’échelle de progression des bonus est la même que celle de la troisième édition. Il est à noter cependant que leur valeur a été limitée à 20 maximum pour les PJ et que seule la magie permettra de dépasser ce plafond. Les jets de caractéristiques servent donc à tout, aussi bien au combat que pour l’utilisation des compétences, mais ils font aussi office de jets de sauvegarde. À ce bonus de caractéristique s’ajoute un unique bonus de maîtrise qui dépend du niveau du personnage. Si on est compétent, on ajoute ce bonus, sinon seule la caractéristique compte. La progression du bonus de maitrise est elle aussi sévèrement encadrée puisqu’il ne monte qu’à + 6 au niveau 20. Il en résulte une échelle des difficultés beaucoup plus resserrée que dans les deux éditions précédentes, ce qui apporte un peu plus de cohérence à l’univers du jeu puisque ce qui était difficile au niveau 1 le reste au niveau 20, les PJ étant juste mieux armés avec l’expérience pour surmonter l’obstacle. La multiplication des petits bonus, qui transformait parfois les parties de D&D en compétition de calcul mental, a elle aussi été balayée au profit d’un très ingénieux système d’avantage/ désavantage. Le principe en est simple: si on est avantagé par les circonstances pour réussir une action, on lance deux D20 et on garde le meilleur, si à l’inverse on est désavantagé, on garde le moins bon. Le meneur peut les assigner à sa guise s’il juge que la situation s’y prête, et c’est dans cette liberté accordée au meneur que réside toute l’élégance de cette règle.

Le chapitre suivant donne toutes les indications nécessaires pour gérer les voyages, l’exploration des donjons, les interactions sociales avec les PNJ ainsi que le temps de repos entre les aventures au cours duquel les personnages peuvent gérer les autres aspects de leur vie.

Enfin viennent les règles dédiées au combat. La base de celui-ci est la même que pour le reste du système, le jet d’un D20 + bonus d’attaque devant passer la diffi culté représentée par la classe d’armure. En cas de réussite, on inflige des dégâts qui viennent se retrancher du total de points de vie de la cible. On notera à ce sujet qu’un encadré est dédié spécialement à ce que représente une perte de points de vie, qui n’est pas forcément une blessure mais peut tout aussi bien être un coup évité de justesse, une bosse dans son armure ou une perte d’équilibre l’espace d’un instant, la gravité de l’interprétation dépendant avant tout du nombre de points de vie restant à la cible. Le reste du chapitre détaille les règles d’initiative et de surprise, les différentes actions qu’on peut entreprendre dans le combat, comme se désengager ou aider un allié, ainsi qu’un bref aperçu du combat monté et du combat sous-marin.

Le troisième chapitre est consacré à la magie, les quelques premières pages expliquant comment lancer un sort et comment y résister. Le nouveau concept de la concentration est également détaillé et devrait limiter le cumul de sorts de buffs puisque la plupart d’entre eux nécessitent que le lanceur se concentre pour les maintenir et qu’on ne peut se concentrer que sur un seul sort la fois.

Les quelques 80 pages suivantes présentent la description des sorts, parmi lesquels on retrouvera tous les grands classiques de la boule de feu à la porte dimensionnelle en passant par les résurrections. L’ouvrage se conclut par une série d’appendices dont la présence n’est pas si anecdotique. L’appendice A rassemble de manière très pratique les conditions qui peuvent affecter les personnages et leurs ennemis, comme la cécité, la peur ou la paralysie. L’appendice B décrit plusieurs panthéons utilisables par les joueurs, et aux côtés de celui des Royaumes oubliés, on retrouve avec joie ceux de Greyhawk, de Dragonlance et d’Eberron. L’appendice C donne un aperçu de la nouvelle cosmologie du multivers D&D et de ses plans. L’appendice D est un bestiaire réduit dans lequel on trouve toutes les créatures que les joueurs peuvent avoir de leur côté, des compagnons animaux aux mort-vivants mineurs en passant par les familiers. L’appendice E fera bondir de bonheur le coeur des grognards nostalgiques puisqu’il voit le retour des conseils de lectures pouvant servir d’inspiration, que Gary Gygax avait compilés lui-même pour la première édition et qui ont été augmentés des incontournables de ces dernières années, comme le Trône de fer par exemple.

Le manuel des joueurs est donc un ouvrage extrêmement complet qui va permettre de jouer à peu près tout ce qu’on veut pour un bon bout de temps. C’est d’ailleurs le plan de Wizards of the Coast qui semble vouloir renoncer à gaver son planning de sortie d’une avalanche de suppléments de règles pour se concentrer plutôt sur le développement de ses univers au travers de campagnes et de livres d’univers, qui eux-mêmes devraient se succéder avec plus de parcimonie que par le passé et laisser le temps aux joueurs de vraiment profiter de leurs acquisitions sans risquer l’overdose. Les six prochains mois ne verront donc la parution que du bestiaire monstrueux qui devrait, lui aussi, être assez exhaustif, du guide du maître qui apportera un certain nombre de modules optionnels plutôt dans la veine de l’Unearthed Arcana ou des Player’s options de la deuxième édition, et enfin les deux volets de la campagne Tyranny of Dragons, qui permettra aux joueurs de se frotter au retour de Tiamat, la Reine des Dragons dans les Royaumes oubliés. Puis les sorties devraient garder ce même rythme et voir le retour d’autres univers classiques de D&D.

Bref l’avenir de Donjons & Dragons semble se profiler sous les meilleurs auspices, et c’est tant mieux!

Thomas Laidet.

D&D BASIC RULES
Pour ceux qui seraient intimidés par le foisonnement d’options que propose le manuel des joueurs ou qui hésiteraient encore à passer le pas les yeux fermés vers la nouvelle édition, Wizards a trouvé la solution: D&D Basic Rules ! Ce PDF d’une centaine de pages contient, comme son nom l’indique, une version épurée de D&D5 complètement gratuite et en téléchargement libre sur le site de Wizards.

Cette simplification touche avant tout la création de personnage, qui ne propose que les versions les plus iconiques des quatre classes de base (le guerrier, le voleur, le mage et le clerc), ainsi que les races les plus connues (humains, elfes, nains et halfelins). Le même travail de tri a été opéré sur la liste des sorts, qui passe de 370 dans le manuel des joueurs à 120 dans les Basic Rules. En revanche, la sélection finale, tant des classes que des sorts, reprend exactement le même texte que celui du manuel des joueurs, et c’est aussi le cas pour le chapitre sur les règles du jeu, qui est repris in extenso. Il s’agit d’ailleurs d’un document évolutif qui intégrera bientôt les monstres les plus indispensables du bestiaire monstrueux, ainsi qu’une liste d’objets magiques tirés du guide du maître.

Si la mise en page aérée et claire permet d’avoir un document plutôt agréable à lire, on pourra regretter, malgré tout, l’absence totale d’illustrations (mais bon, c’est gratuit, on va pas trop se plaindre non plus).

L’objectif avoué de Wizards avec ces Basic Rules est de mettre l’expérience D&D à la portée du plus grand nombre, et de permettre à ceux qui seraient tentés par les scénarios qu’ils vont publier de se jeter dans l’aventure, sans pour autant investir les 150€ que coûte le triptyque de base, et ainsi de prendre goût au jeu de rôle, pour finir par craquer pour le reste de la gamme.

POUR TÉLÉCHARGER LES BASIC RULES
DnD_BasicRules_2018

 

ET LA VERSION FRANÇAISE DE D&D5?
Devant l’absence totale de nouvelles sur une éventuelle traduction, l’inquiétude commençait à monter sérieusement parmi les fans français de D&D. C’est pourquoi nous avons pris notre bâton de pèlerin pour aller débusquer Mike Mearls, le lead designer de la nouvelle édition, et en conséquence l’homme le plus demandé de la Gen Con, pour qu’il nous dise enfin où tout cela en est.

Je vous rassure tout de suite: oui, il y aura une traduction française, et contrairement aux rumeurs, oui, Wizards considère que les traductions sont vitales à la bonne santé de la franchise à l’international. C’est d’ailleurs parce qu’ils prennent ça au sérieux que ça va prendre du temps. L’objectif est en effet de synchroniser toutes les sorties entre elles, quelle que soit leur langue, pour que les joueurs du monde entier puissent tous s’impliquer simultanément dans les storylines qui vont structurer tous les produits estampillés D&D. Mais pour que la VF puisse sortir en même temps que la VO, il faudrait que l’équipe de Wizards soit en mesure d’envoyer les textes définitifs largement en amont aux partenaires locaux qu’ils choisiront pour faire cette traduction, ce qui a été pour l’instant impossible, vu le travail colossal qu’a demandé la nouvelle édition. Cependant, Mike a bon espoir que les choses se normalisent assez rapidement afin de pouvoir lancer la machine au début de l’année prochaine, ce qui peut nous laisser espérer que les traductions soient prêtes pour le deuxième semestre 2015, au plus tôt. Il va juste falloir être un peu patient…

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